Mi-parcours effectué

La veille de ma chirurgie, alors que mon chéri était parti pour une centaine de kilomètres de vélo, junior a été pris d’une terrifiante diarrhée. On a donc décidé de ne pas l’envoyer à la garderie le lendemain. Mon père l’a donc emmené chez lui, après m’avoir laissée en chirurgie d’un jour et d’avoir apporté mes effets personnels.

J’ai passé près de trois heures toute seule sur une chaise droite, à me geler les pieds sur le plancher de l’hôpital en écoutant les infirmières répéter ad nauséam les instructions d’usage pour les (innombrables) opérés de la cataracte. J’ai somnolé en essayant d’oublier à quel point j’avais faim et en espérant très fort ne pas être prise de diarrhée sur la table d’opération.

La procédure s’est bien déroulée et la chirurgienne s’est faite rassurante concernant ma réhabilitation. En fait, la résidente qui avait réussi à me faire paniquer et croire que je ne pourrais pas faire de vélo de l’été, en me dirigeant tout droit en physiothérapie a des croûtes à manger, quelle surprise!

Je ressors de l’opération avec une cicatrice un peu plus grande que précédemment et un impressionnant drain temporaire (un tube et une poire) destiné à éviter que les vides laissés par le retrait des ganglions ne se remplissent de liquide. C’est assez répugnant, pour quiconque n’étant pas à l’aise avec les fluides corporels.

Mon séjour à l’hôpital s’est bien déroulé. Les travailleurs de la santé sont vraiment des gens dévoués. À travers les malcommodes qui arrachent leur soluté et les princesses qui hurlent les doses de médicaments qu’elles estiment avoir besoin, ils arrivent à faire un travail correct. J’avais cependant hâte de quitter l’établissement.

Quelques minutes après qu’on m’ait enlevé mon soluté, la diarrhée s’est manifestée de manière fulgurante. Je suis maintenant malade depuis quarante-huit heures : c’est pas la grosse joie et ça ne facilite pas la récupération.

Avant la chirurgie, j’ai fait le plein à la bibliothèque et le premier livre que j’ai lu était le dernier de la série «cancer» que j’avais sur ma liste. Chronique d’un cancer ordinaire de Dominique Demers est particulièrement intéressant (du fait qu’il soit bien écrit, notamment) mais plutôt déprimant pour la suite.

En effet, j’en arrive à la moitié de mes traitements : la chimiothérapie et la chirurgie sont derrières moi, la radiothérapie et l’hormonothérapie suivront. C’est cette dernière, l’hormonothérapie, qui me chicotte maintenant puisqu’au dire de Mme Demers, qui en a supporté quatre ans (plutôt que les cinq ou dix prescrits), c’est comme «la ménopause fois mille». Oh boy.

Sachant qu’il est inutile de paniquer d’avance, je vais me concentrer sur une autre pensée inspirée d’un film cette fois, voulant que l’allure de notre gazon et notre bonheur soit relié («les gens heureux ne laissent pas mourir le gazon», ou quelque chose du genre). Il se trouve que mon gazon, en ce joyeux printemps, a l’air d’une prairie garnie d’un sympathique mélange de myosotis, pissenlits et fraisiers : c’est très joli.

Et puisque ma réhabilitation physique ne semble pas être un enjeu, je vais dès que possible me remettre au jogging en vue de la course du 3 juillet prochain.

Pilosité

Avec l’arrivée du temps clément, je peux enfin dire Bye Bye au p’tit maudit foulard. Ça donne des situations cocasses comme le petit garçon au parc qui dit, en parlant de mon garçon, «il est avec son papa», en parlant de moi…

J’admets qu’arborer mon look de skin head au parc n’est pas la meilleure des stratégies pour m’intégrer à la faune locale et ainsi éviter que mon fils se fasse pousser en bas de la structure de jeu. M’enfin, je m’assume et j’aspire à avoir un bronzage «casque de vélo» sur le crane.

Mes cheveux mesurent un centimètre et demi environ, sans trop de densité cependant. Rien à voir avec des cheveux rasés, selon moi. À ce propos, j’ai eu une réflexion complètement déplacée selon laquelle se raser la tête «pour la cause» n’a rien à voir avec la perte de cheveux. Comme quoi je dis souvent n’importe quoi…

Aujourd’hui, j’ai beaucoup pleuré en pensant au drame que vit la seule personne que je connaisse qui ait déjà participé au Défi têtes rasées, Fabienne. Elle vient de perdre son petit garçon de treize mois, décédé tragiquement d’étouffement.

Je vais penser à elle quand je vais serrer mon fils dans mes bras. Et surtout, ça va m’aider à arrêter de déprimer parce que ma prochaine chirurgie va probablement m’empêcher de participer à la course à laquelle je me suis inscrite et de profiter pleinement d’une saison de vélo.

Bref, les nouvelles auraient pu être meilleures. Il reste des cellules cancéreuses impossibles à enlever du côté de mon sein, que l’on devra éliminer par radiothérapie. Puis, le ganglion sentinelle prélevé présentait aussi des cellules cancéreuses, c’est pourquoi on va me réopérer pour enlever d’autres ganglions.

La chirurgie est prévue pour le 24 mai prochain, d’ici là, j’espère être sur mon vélo le plus souvent possible. Il n’y a rien de tel que sentir la roue d’en avant qui lève dans une côte trop abrupte pour te reconnecter avec l’essentiel.

Bisous.

Averse

Courir par un temps de canard n’est pas très agréable. Oh oui, la zone zen est enfin déserte et t’as l’impression de courir «pour vrai» (pas juste pour montrer ton beau linge), mais à chaque pas ça fait «floc», tes sous-vêtements sont trempés, il fait frette.

J’y suis allée quand même ce matin, parce que je dois me préparer pour une course, mais surtout parce que mon chum me surveille et me fouette. Il est allé jusqu’à me couper le chocolat, faut le faire! Je ne comprends pas très bien l’expression «to quit cold turkey» mais je sais très bien c’est qui la dinde 😉

Après avoir joggé la moitié de mon objectif, j’étais en train de me chercher une excuse pour couper ça court et rentrer : il faut dire que jogger sous la pluie c’est encore pire que courir sous la pluie, enfin moi ça me paraît interminable!

Puis, j’ai aperçu une tache rouge et une tache jaune, sur le bord de la piste au marché : un petit poussin et un grand nono, mes amours! Je me suis redressée et j’ai accéléré, comme à la fin des courses quand j’essaie de bien paraître…

Arrivée près de l’escalier, j’ai continué, pour me donner bonne conscience, puis j’ai rebroussé chemin et je suis monté vers la maison. Mes cuisses ont crié très fort. Il faut dire que reprendre le jogging c’est difficile. Et que j’ai aussi fait deux moyennes sorties de vélo dans les deux derniers jours.

Je sais, j’exagère. Mais je vous rappelle qu’on m’a coupé le chocolat! En fait, toutes ces activités sportives m’ont bien changé les idées. J’en ai besoin car vendredi j’ai appris que mon rendez-vous de suivi post-chirurgical était devancé de trois semaines et aurait lieu ce lundi.

Ça veut dire que les résultats de la pathologie sont arrivés. Évidemment, j’ai tout de suite pensé au pire : des traces de cancer dans le ganglion sentinelle qui demanderaient une nouvelle chirurgie pour enlever tous les ganglions, une convalescence plus difficile, bye bye vélo et jogging… Ensuite, mon chum m’a dit que ce pourrait être encore pire : des traces de cancer dans les tissus du sein que j’étais si heureuse d’avoir sauvé, bye bye moral de béton…

Dans les faits, ça pourrait aussi être aucunes traces de cancer et on poursuit le traitement par la radiothérapie. Mais ça, ça m’a pris plusieurs kilomètres de vélo pour le comprendre. Bref, ça devrait aller. Je vais éviter les autobus (ah oui, je ne l’ai pas publiée cette aventure-là… me suis pogné avec un chauffeur d’autobus et j’ai presque fondu en larmes, de la grosse instabilité émotionnelle) et compter sur tous mes gentils «allumeurs de lampions» pour que les nouvelles soient bonnes.